Décryptage

Finances publiques : ce que le budget 2025 réserve au BTP

Logement, collectivités, énergie et climat : si le texte adopté le 5 février reprend les grandes lignes du PLF proposé par le précédent gouvernement, il comprend quelques modifications notables.

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Logement

Le PTZ sans restriction géographique fait l'unanimité

« L'opiniâtreté a payé », se félicite Olivier Salleron. A l'instar des autres représentants de l'Alliance pour le logement, le président de la FFB se satisfait de quatre dispositions actées dans le cadre de la commission mixte paritaire (CMP) du projet de loi de finances (PLF) 2025. Mesure phare proposée à l'automne par le gouvernement Barnier, la restauration d'un prêt à taux zéro (PTZ) facilitant l'accession à un logement neuf individuel ou collectif pour les primo-accédants sur tout le territoire constitue une victoire pour les professionnels, en particulier les CMistes. Cet élargissement interviendra au plus tôt le 1er avril. En 2024, le dispositif avait été recentré sur les appartements neufs en zones dites « tendues » : A, Abis et B1. Dans l'ancien, il ciblait les logements des zones détendues (B2 et C), sous condition d'une rénovation énergétique, une disposition toujours valable cette année.

La baisse de la RLS, un premier pas vers la suppression ?

La présidente de l'Union sociale pour l'habitat, Emmanuelle Cosse, le reconnaît : « Il y a, dans ce budget, des mesures qui vont dans le bon sens. » A commencer par la baisse de 200 M€ de la réduction de loyer de solidarité (RLS), également souhaitée par le précédent exécutif. Elle est considérée par les bailleurs sociaux comme une première étape avant sa suppression qu'ils réclament pour ne plus limiter leurs capacités de financement de constructions et de rénovations. Concrètement, la ponction par l'Etat de 1,3 Md € sur leur chiffre d'affaires global de l'an dernier passe à 1,1 Md € en 2025. Cette mesure « permettra d'accroître la production et la rénovation des logements sociaux », estime le ministère du Logement. En accord avec ce dernier, les organismes HLM viseront cette année 116 500 agréments, contre 98 682 en 2024.

La rénovation énergétique sur la voie de la stabilité

Autre motif de satisfaction pour les professionnels du logement : la stabilité des conditions d'accès à MaPrimeRénov'.

Comme l'année dernière, les ménages pourront aussi bien financer une rénovation d'ampleur qu'un seul geste. Petite déception toutefois : la subvention versée par l'Etat s'élèvera à 2,1 Mds €, soit autant qu'en 2023, mais en baisse de 16 % par rapport à la version imaginée par le gouvernement Barnier. En janvier 2024, 3,1 Mds € avaient été alloués au principal dispositif de soutien à la rénovation énergétique des logements.

La réduction des crédits de paiement en 2025 n'aura « pas de conséquences sur le versement des aides », promet le ministère du Logement, ajoutant que Bercy abondera le budget de l'Anah si celui-ci devait être entièrement consommé d'ici la fin de l'année. Reste que « la baisse de dotation de l'Etat « amènera notamment l'Anah à puiser dans sa trésorerie », craint, pour sa part, l'Institut de l'économie pour le climat.

En matière de rénovation toujours, citons également la prorogation jusqu'en 2027 de Loc'Avantages qui exclut les passoires thermiques, dont les plus mauvaises (étiquetées G) ne peuvent plus être mises en location depuis le 1er janvier. Grâce à ce dispositif, les propriétaires bailleurs bénéficient d'une réduction d'impôt s'ils louent leur bien, affichant une note comprise entre A et E, à un montant inférieur aux loyers du marché local. En complément, l'Anah peut leur verser des aides à la rénovation énergétique.

Relance du neuf : le dispositif d'exonération des donations salué

Si elle approuve « l'exonération temporaire des donations à hauteur de 300 000 euros maximum par donataire en vue de la construction ou de l'acquisition d'une résidence principale », au nom de la relance du neuf notamment, l'Alliance pour le logement ne mentionne pas l'enveloppe de 100 M€ dédiée aux « maires bâtisseurs ». Une mesure que la Fédération des promoteurs immobiliers trouve, elle, « anecdotique ». L'organisation milite pour le fléchage d'une partie de la TVA immobilière vers les communes. « Les logements supplémentaires réalisés grâce à cette incitation financière rapporteraient à l'Etat et aux collectivités », argumente-t-elle.

La hausse des droits de mutation irrite le secteur

Une disposition crispe le secteur du logement, et au premier chef les promoteurs : la possibilité d'augmenter de 0,5 point les droits de mutation à titre onéreux (DMTO). L'idée du précédent exécutif reprise par celui de François Bayrou était de donner de l'air aux collectivités, en particulier aux départements qui les collectent et les perçoivent en partie. Ceux-ci sont affectés par la baisse des transactions immobilières depuis 2021, année record, avec plus de 1,1 million d'opérations enregistrées par les notaires. Comme promis par le gouvernement actuel, les primo-accédants ne sont pas concernés, mais les secundo-accédants ou les investisseurs locatifs qui achètent un logement neuf n'y échapperont pas, contrairement à ce qui avait été annoncé. Cette augmentation pourrait se traduire pour les acquéreurs par « 500 à 1 000 euros en plus pour l'achat d'un bien immobilier de 200 000 euros, selon les territoires », avait estimé Catherine Vautrin, ex-ministre du Partenariat avec les territoires, en novembre dernier.

Le renouvellement urbain, toujours d'actualité

Le budget 2025 confirme le soutien au renouvellement urbain. L'Anru, désormais présidé par l'ancien ministre Patrice Vergriete, bénéficiera d'un abondement de 50 M€. Enfin, le ministère du Logement réaffirme son « engagement pour le renouveau du bassin minier », avec le programme ERBM. Les 17 M€ promis en novembre dernier par la ministre du Logement Valérie Létard, par ailleurs élue de la région, pour l'aménagement de ce territoire, ainsi que les 8 M€ fléchés sur la rénovation de son parc social, restent d'actualité.

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Collectivités

Amputé de 2 Mds €, le fonds de précaution toujours vilipendé

« Pour l'essentiel, la CMP a entériné les orientations prises cet automne au Sénat. » L'analyse de Yann Doyen, directeur des engagements de l'Agence France locale, à propos des dispositions relatives aux budgets publics locaux, s'applique à la mesure qui les touche le plus directement : le « fonds de garantie » s'élèvera à 1 Md € prélevé sur 2 000 budgets de fonctionnement. La première version du PLF présentée par le gouvernement Barnier prévoyait 3 Mds € partagés entre 400 collectivités. Mais, même réduit de 2 Mds € avec une assiette élargie, ce fonds de précaution continue de susciter l'opposition unanime des élus locaux. C'est particulièrement le cas des conseils départementaux qui ne digèrent toujours pas la part leur incombant dans le fonds, soit 40 % de l'effort.

Le fonds vert privé de plus de 1 Md €

Le fonds vert voit son budget passer de 2,5 Mds € - annoncés au printemps 2024 par l'ancien ministre de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu - à 1,15 Md €. Notons que lors de l'examen du budget en CMP, les parlementaires ont annulé une coupe budgétaire supplémentaire de 500 M€ qui avait été votée par les sénateurs.

Les dotations maintenues

L'Etat maintient comme prévu ses dotations, en dehors d'un effet de vases communicants au profit de la dotation globale de fonctionnement et au détriment de la dotation de soutien à l'investissement local.

La principale nouveauté réside dans l'abandon de la réduction du taux de compensation du fonds de compensation de la TVA (FCTVA).

Grâce à son maintien à 16,4 %, au lieu des 14,85 % envisagés dans le budget Barnier, les collectivités récupèrent 800 M€ directement rattachés à leur budget d'investissement.

Le gel de la TVA ne passe pas dans les départements

Les conseils départementaux dénoncent la confirmation de la mesure qu'ils considèrent comme « la plus pernicieuse » : le gel des recettes issues de la TVA affectées aux collectivités, qui devrait leur coûter 1,2 Md €. Cet arbitrage les prive « de la dynamique de leur principale ressource, qui leur a pourtant été historiquement présentée comme une compensation face à la perte de recettes fiscales engendrée par le transfert du foncier bâti au bloc communal », s'étrangle l'Assemblée des départements de France. Certes, l'association reconnaît que « la possibilité d'augmenter temporairement le plafond des droits de mutation (DMTO) de 0,5 point maximum devrait permettre à certains départements d'absorber en partie ce énième choc budgétaire ». Mais elle relativise l'impact de cette mesure qui exclut les primo-accédants.

A l'Agence France locale, Yann Doyen pointe « un renforcement de la dépendance des départements à une recette cyclique », avant d'ajouter : « Ce n'est pas une bonne réponse à moyen terme. »

Mobilités : le versement de la discorde

Quelques jours avant la réunion de la CMP, le bras de fer entre le gouvernement et les régions sur le versement mobilité a tourné à l'avantage des secondes, qui, soutenues par la prise de position d'Alain Grizaud, président de la FNTP, pourront en bénéficier. Au lieu des 0,2 % défendus à l'automne dernier par Philippe Tabarot, alors rapporteur du budget des Transports au Sénat, le plafond de la taxe pourra finalement être relevé de 0,15 %. Cet épisode aura créé une pomme de discorde entre collectivités : également habilités à prélever le versement mobilité, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dotés du statut d'autorité organisatrice dénoncent un nouveau prélèvement sur une ressource en tension.

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Energie et Climat

Le fonds chaleur malgré tout

« Au milieu du marasme, nous avons sauvé l'essentiel du fonds chaleur. » Le soulagement teinté d'amertume de Nicolas Garnier, délégué général de l'association Amorce dit tout de l'état d'esprit du secteur de l'énergie, par ailleurs en attente de la publication de la prochaine programmation pluriannuelle de l'énergie dite PPE 3.

Alors que les crédits dédiés à la mission « écologie » ont été rognés de 3 Mds €, le fonds destiné au développement des projets de chaleur renouvelable a été maintenu au niveau de 2024, soit 820 M€. « Mais les besoins sont estimés à 1,5 Md € », rappelle Pascal Guillaume, président de la Fédération des services énergie environnement.

La mystérieuse disparition du fonds territorial climat

Votée contre l'avis du gouvernement et maintenue dans la version de la commission mixte paritaire, la création d'un fonds « climat territorial » doté de 200 M€ « encore dans les tuyaux lundi 3 février au soir », selon Nicolas Garnier, a tout bonnement disparu du texte final. Ce fonds visait à allouer aux collectivités ayant élaboré un plan climat-air-énergie territorial (PCAET) 4 euros par habitant pour développer l'ingénierie nécessaire pour mettre en œuvre leur programmation écologique.

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