C’est une première. Sur le chantier du pont de Kincardine, en Ecosse (« Le Moniteur » n° 5 440 du 29 février 2008, p. 8), les équipes de Vinci Construction Grands Projets ont mis en œuvre une alternative au recépage des pieux en béton armé. « Lors du coulage d’un pieu, le premier béton coulé en pied se mélange à l’eau et aux matériaux du sous-sol, puis remonte pour se retrouver en tête du pieu en fin de coulage », explique Francis Guinchard, directeur du projet pour Vinci Construction Grands Projets. Cette épaisseur de béton pollué (de 50 cm à 1 m), structurellement faible, est habituellement recépée, c’est-à-dire supprimée, une fois le pieu coulé et pris.
Ici, recéper les 20 monopieux géants (de 3 m à 3,80 m de diamètre pour 30 m de long) fondant les piles situées dans le lit de la rivière Forth ne semblait pas réaliste. Pour piquer l’épaisseur de béton souillé, il aurait fallu descendre des hommes à l’intérieur de la chemise d’acier cylindrique qui sert de coffrage aux pieux. « A 9 m de profondeur dans un espace confiné, c’était trop risqué pour les hommes et techniquement contraignant », explique Francis Guinchard. Il a donc été décidé que loin d’être éliminé, le béton pollué serait intégré au cœur du pieu ! Lors du coulage, un volume perdu prédéterminé de béton souillé se déverse ainsi par gravité dans un contre-gainage métallique cylindrique, réceptacle fermé en pied (voir schéma). « Ce volume n’est pas considéré comme porteur dans les calculs, explique Francis Guinchard. Le bureau d’études a donc dû vérifier que la couronne de béton sain en tête de pieu était suffisante pour supporter les descentes de charges des piles. »
Gain de temps
Grâce à ce système, baptisé « autorecépage », la tête du pieu se constitue automatiquement de béton sain. Après une simple préparation de surface, la pile peut alors être coulée directement.
Outre le gain de temps de mise en œuvre, le problème de sécurité pour les hommes est supprimé, puisque la zone polluée ne demande pas de traitement particulier. Pour la même raison, cette solution a également permis de réduire les coûts de construction des fondations. Le pont, dont le très long tablier en béton (1 190 m) a été poussé, sera inauguré en novembre.
