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Gouvernement, crise du logement : comment Emmanuelle Cosse aborde le Congrès HLM

En amont du rendez-vous annuel des bailleurs sociaux, la présidente de l’Union sociale pour l’habitat (USH) alerte sur le manque de soutien des pouvoirs publics aux organismes HLM confrontés au double défi de construire et rénover.

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Emmanuelle Cosse
Emmanuelle Cosse , présidente de l'USH À Paris, le 4 septembre 2024.

C’est la grande inconnue du prochain Congrès HLM. Le gouvernement Barnier sera-t-il représenté au Parc des expositions de Montpellier du 24 au 26 septembre ? Habituellement, l’événement national qui réunit les bailleurs sociaux ainsi que des promoteurs immobiliers, collectivités… investis dans le logement social est l’occasion pour l’exécutif d’annoncer des mesures pour la filière.

L’an dernier à Nantes, Patrice Vergriete, alors ministre du Logement, avait notamment promis un fonds dédié à la rénovation énergétique des logements locatifs sociaux (LLS) doté de 1,2Md€ sur trois ans. La promesse avait été tenue pour 2024 : la loi de finances qui s’en est suivie prévoit en effet 400M€ de subventions aux organismes et communes gestionnaires de LLS qui engagent des travaux permettant d’atteindre au minimum la classe C du DPE et un gain énergétique de 40%. Mais à l’ère de la rigueur budgétaire, que va-t-il advenir du reste de l’enveloppe annoncée, à savoir 800M€ en 2025 et 2026 ?

« J’attends du gouvernement, non pas une baisse de la dépense publique, mais un plan massif, une mobilisation générale pour le logement social », déclare Emmanuelle Cosse, la présidente de l’Union sociale pour l’habitat (USH), qui réunit les différentes familles d’organismes HLM, en exclusivité au « Moniteur ».

Comment convaincre le nouvel exécutif, alors que certaines prises de position politiques penchent vers un tour de vis général, investissements compris ? « Cette crise du logement, inédite par son ampleur et sa durée en métropole et dans les Outre-mer, engendre une augmentation du déficit et de la dette publics, de par une baisse des recettes. Celle-ci est notamment liée au recul des transactions immobilières, qui entraîne une régression de la TVA et une dégringolade des droits de mutation (récoltés par les départements, NDLR). Laisser aggraver la crise du logement, c’est creuser le déficit public », conclut Emmanuelle Cosse.

« Nous n’arrivons pas à produire ni à rénover au rythme souhaité »

Deux mois et demi après le deuxième tour des élections législatives post-dissolution, la porte-parole des organismes HLM se montre pessimiste : « La filière manque de soutien (des pouvoirs publics, NDLR). Résultat, nous n’arrivons pas à produire ni à rénover au rythme souhaité. Sur les mises en chantier, ce sont les pires chiffres depuis dix ans, après avoir atteint le fond en termes d’agréments en 2023. Les réservations en bloc par les bailleurs sociaux auprès des promoteurs n’augmentent pas. L’attentisme politique et le climat économique ne vont pas aider à améliorer la situation. »

Le tableau est toutefois plus sombre chez les promoteurs, contraints de licencier sur fond de crise de la demande persistante. Ces partenaires, qui ont représenté 58% de la construction HLM en 2023, continuent en outre de lever le pied sur les mises en chantier. Autant de programmes neufs intégrant du logement social en moins... « Pour sortir de cette dépendance (vis-à-vis des promoteurs, NDLR), je souhaite que chaque bailleur social augmente la part de maîtrise d’ouvrage directe dans sa production et ait accès aux fonciers publics. Il est anormal qu’ils ne puissent pas construire en propre sur des opérations publiques ou dans le cadre du renouvellement urbain », assure Emmanuelle Cosse.

La RLS, toujours dans le viseur

Cette reprise en main de son destin suppose que chaque Entreprise sociale pour l’habitat (ESH) ou Office public de l’habitat (OPH) en ait les moyens… Or, « depuis 2018, 14Mds€ ont été pris aux bailleurs par l’Etat pour ne pas être investis dans le logement social », rappelle Emmanuelle Cosse. L’ex-ministre fait référence à la Réduction de loyer de solidarité (RLS) qu’il faut supprimer, répètent depuis des années les organismes HLM. Bonne nouvelle : depuis plusieurs mois, des parlementaires de l’ex-majorité militent eux aussi contre la RLS, au nom de la relance de la production sociale.

Il y a urgence : la France compte 2,7 millions de ménages en attente d’un premier logement social ou d’un relogement, soit 100 000 de plus en seulement six mois. L’an dernier, 81 000 LLS ont été commencés, soit 44 000 de moins par rapport à l’objectif d’Emmanuelle Wargon, prononcé en 2021 quand elle était ministre du Logement. En 2022, son successeur Olivier Klein jugeait que « produire chaque année 110 000 HLM (était) un niveau ambitieux ». Dans un document de présentation de son projet de loi abandonné sur le « logement abordable », le précédent gouvernement évoquait une « production annuelle » de 100 000 logements sociaux.

Si nomination il y a ces prochains jours, le porte-parole du gouvernement se risquera-t-il à annoncer des objectifs de production devant les congressistes ? Rendez-vous le 26 septembre, pour le discours de clôture du Congrès HLM, qui permet traditionnellement à l’exécutif de dérouler sa feuille de route pour le logement social.

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