2019 a été marquée par un ralentissement de la construction de logements neufs. Et avec un recul de 3,3% des ventes, la Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI) fait grise mine.
La fédération, qui regroupe les promoteurs immobiliers français (en logement et en entreprise), a publié le 5 mars les chiffres de son observatoire statistique national (un baromètre des indicateurs des régions de France), pour le 4e trimestre 2019 et l’ensemble de l’année. Les résultats sont peu encourageants.
Alexis Rouque, le délégué général, note tout d’abord certains indicateurs positifs, comme le pouvoir d’achat des ménages en légère hausse, et le bon indice de confiance de l’Insee. Dans la construction de logements aussi, il y a de quoi être satisfait : « la France reste un pays bâtisseur avec 410 000 mises en chantier. Aux Etats-Unis ou la population est cinq fois supérieure à la nôtre, ils n’ont construit qu’un million de logement », assure-t-il. La construction pavillonnaire évolue de manière positive, avec 4,6% de hausse.
2019 : la demande ne rencontre pas d’offre
Cependant, le ton général du bilan de la FPI reste pessimiste, en raison d’un déséquilibre majeur entre l’offre et la demande dans l’immobilier neuf.
Si la demande, en légère baisse, reste soutenue en 2019 avec près de 160 000 logements vendus par les promoteurs (en recul cependant de 3,3% par rapport à 2018), l’offre décline fortement.

Le stock de logements est inférieur à 9 mois de vente dans plusieurs métropoles. Il atteint même 7,2 mois en Ile-de-France. Il y avait 63 000 logements en projet mi-2018, 18 mois plus tard il y en a près de 20 000 en moins. Les mises en vente ont donc diminué de 14,2%, après 5 ans de hausse continue.
Sur la vente en bloc, (acquisition d’un immeuble entier ou de tout un programme immobilier par un seul acquéreur), les réservations chutent de 6,2% par rapport au T4 2018 après pourtant un bon T3 2019. « Les ventes en bloc diminuent depuis 3 ans. Cela correspond au temps de réforme et de réorganisation de la production », explique Alexandra François‐Cuxac, la présidente de la FPI.
Un T4 2019 du niveau de 2016
Cela aboutit à un dernier trimestre 2019 parmi « les plus faibles depuis 4 ans. Nous revenons au niveau de 2016, même en dessous en ce qui concerne les investisseurs », s’inquiète-t-elle.
La fédération explique ce déclin par une « diminution des permis de construire, (-6,7 % sur un an pour les logements collectifs), des projets toujours plus longs à faire aboutir, des coûts de travaux trop élevés et un manque de disponibilité des entreprises du bâtiment ».
Alexandra François‐Cuxac regrette cette année « trouble-fête. La frustration est d’autant plus grande pour les professionnels que la demande est au rendez-vous, du côté des particuliers comme des organismes HLM et des institutionnels ».
Cette tension entre l’offre et la demande fait monter les prix. Pour un logement neuf, le prix a ainsi augmenté de 4,6% en 2019. Sur un 60 m², cela signifie 9 000€ de plus en un an en province, et 12 000€ en Ile-de-France.
« 2020 va être une année blanche et les banquiers le savent bien »
Et rien ne devrait égayer l’année à venir. La FPI prédit que les déséquilibres de 2019 ne se résorberont pas rapidement. Le cycle « baisse des permis, baisses des mises en chantier, baisse des mises en vente, hausse des prix, baisse des ventes » est installé depuis plusieurs trimestres, assure la fédération.
Pire : « 2020 va être une année blanche et les banquiers le savent bien », annonce Alexandra François‐Cuxac. « Les nombreux permis de construire déposés après les élections vont engorger les services d’urbanisme et la construction ne redémarrera pas directement derrière », s’inquiète-t-elle. « Mécaniquement les prix ne baisseront pas alors qu’il y a des besoins dans ce pays chez les jeunes, les étudiants comme les actifs et les seniors qui ne sont pas tous en Ehpad. »
Sur le financement aussi un doute persiste, notamment en raison de la demande de la Banque Centrale Européenne de réduire la manne du crédit. Un représentant de Banque Populaire assure le 5 mars : « nous allons rester vigilants mais nous manquons de recul, le phénomène est récent ».
Quel sera l'impact de la RE2020 sur les prix ?
La FPI estime que c’est au pouvoirs publics d’agir pour soutenir le logement. « 2019 a été une année de déséquilibre marquée par une contradiction dans les territoires sur les maisons individuelles. Il faut faire de l’écologie, cela veut dire construire moins. Mais nous nous demandons comment nous allons loger les gens qui arrivent », s’agace Alexandra François‐Cuxac. « Pourquoi à l’échelle nationale nous ne sortons pas les grands moyens pour loger les ménages ? ».
La FPI attend donc les résultats des élections municipales, une « étape clé » dit-elle-même si la encore, elle se montre défaitiste : « les débats actuels n’incitent pas à l’optimisme ».
Enfin, les doutes grandissent quant à la RE2020. « Nous faisons les ajustements nécessaires pour qu’il y ait le moins d’impact possible sur les maîtres d’ouvrage », précise Alexandra François‐Cuxac. « Nous espérons créer des poches de valeur nouvelles dans notre acte de bâtir pour absorber le coût de cette innovation ». Et Alexis Rouque d’ajouter : « il est impossible de dire aujourd’hui l’impact de la RE2020 sur les prix ».
Dans un climat actuel sinistré par le coronavirus, la présidente de la FPI termine sur une note des plus pessimistes : « Ce n’est pas très joyeux, rien ne permet d’être optimiste pour 2020. Au contraire. »