Les contrats de partenariat sont-ils trop complexes ? Par Lucien Guttières, ingénieur-conseil

⚠️ HTML Subscription Block Access Rights – IPD Block Test

Concept éminemment positif, les contrats de partenariat comportent cependant plusieurs inconvénients qui pourraient expliquer le peu de succès qu’ils connaissent aujourd’hui:

Premier inconvénient : un processus complexe pour les partenaires

Il ne s’agit ni d’un marché public, ni d’une délégation de service public, au sens du droit administratif français, mais d’un marché public de travaux au sens du droit communautaire : le contrat est conclu à titre onéreux entre un pouvoir adjudicateur et un entrepreneur. Il a notamment pour objet la réalisation d’un ouvrage répondant aux besoins précisés par le pouvoir adjudicateur.

La phase d’évaluation doit être rigoureuse avant d’envisager un contrat de partenariat pour des besoins urgents ou complexes, ce qui est difficile à définir. S’ensuit une procédure de sélection (aujourd’hui ramenée à celle de l’appel d’offres restreint), avec des critères incorporant le parti architectural, ou le recours aux PME. Quant à la phase de dialogue (compétitif ?), elle est plus strictement encadrée que la négociation prévue par la loi Sapin pour les délégations de service public et ne permet aucune discussion une fois les offres remises.

La phase de contractualisation doit porter sur la mise au point des clauses traitant notamment : de la durée ; du partage des risques ; des objectifs de performance ; de la rémunération (coûts d’investissement, de fonctionnement et de financement, recettes annexes hors service public, modalités de règlement) ; de la garantie du respect du service public ; des modalités de contrôle de la personne publique ; des modifications par avenant (ou, sinon, par décision unilatérale) ; de la résiliation du contrat et enfin des conséquences de la fin du contrat, notamment pour la propriété des ouvrages.

Ensuite, survient la phase de suivi et de contrôle des performances sur des périodes aussi longues que 20 à 30 ans (évolution et innovation), avec des imprévus, mais aussi des sanctions et pénalisations. Sans oublier la phase de fin de contrat avec les problèmes de réutilisation possible ou de cession des ouvrages et équipements, leur éventuelle obsolescence,...

Deuxième inconvénient : le cocontractant privé est maître d’ouvrage des constructions

Que se passera-t-il en cas de défaillance ? S’agissant par exemple d’un crédit-bail, les financiers prendraient les choses en main. Autre question : qu’en est-il en fin de contrat ? La personne publique peut se trouver propriétaire d’ouvrages obsolètes si la cession a été prévue et si l’innovation n’a pas été intégrée suffisamment pendant la durée du contrat. Enfin se pose le problème financier : le partenaire privé ne peut obtenir de meilleures conditions de taux que la personne publique.

Troisième inconvénient : le partage des risques

Le principe adopté pour le partage des risques réside dans l’allocation optimale consistant à les attribuer au partenaire qui en a la meilleure maîtrise. Pour une contractualisation de ce partage, il convient d’abord de procéder à une analyse en bonne et due forme. Or la diversité des risques à étudier est très vaste:

– risques de construction et conception, en principe à la seule charge du partenaire privé ;

– risques liés au financement (variation économique, renégociation…) ;

– risques juridiques, en début (permis de construire), en cours (défaillance et transfert de propriété), et en fin de contrat (résiliation, cession), à partager de façon pertinente, sans oublier le risque de requalification d’un contrat « mal ficelé » ;

– risques de surcoûts, ou sur performances, en matière d’exploitation, de fonctionnement et d’entretien des constructions, installations et équipements, largement attribués à la personne privée, avec pénalités et sanctions ;

– risques liés à la durée, dont l’absence d’innovation, la baisse des performances globales, voire l’obsolescence de l’objet et des coûts de réhabilitation lourde imprévisibles ;

– risque lié à l’évolutivité des clauses du contrat, tous les risques ne pouvant être prévus, avec au mieux le recours aux avenants, au pire une décision unilatérale de la personne publique, pour prendre en compte l’évolution des besoins, l’innovation technique, ou les modalités de financement.

S’y ajoutent le risque politique (lié à la durée sur plusieurs mandats électoraux) ; le risque commercial lié à l’utilisation des services et à la fréquentation ; le risque financier sur les recettes annexes ; le risque lié au paiement, à couvrir avec garantie de paiement et le risque de force majeure.

Enfin, il ne faut pas que la rémunération du contrat soit assimilable à un remboursement d’emprunt (sinon il serait requalifié en marché public), ni principalement liée à l’exploitation, sinon le contrat de partenariat serait requalifié en délégation de service public.

Newsletter Week-End
Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.
Construction et talents
Les services Le Moniteur
La solution en ligne pour bien construire !
L'expertise juridique des Éditions du Moniteur
Trouvez des fournisseurs du BTP !
Détectez vos opportunités d’affaires