Près de trois ans après la faillite de Philipp Holzmann, un autre grand groupe du BTP en Allemagne, Walter Bau, a déposé le bilan, illustrant la crise profonde que traverse le secteur depuis dix ans dans un contexte de marasme économique.
"Après l'échec des efforts intenses entrepris par l'entreprise et ses créanciers pour trouver des liquidités, le directoire a décidé de déposer le bilan", a expliqué mardi le numéro quatre allemand du secteur, déficitaire et qui emploie 9.000 personnes.
Seule la holding de tête est dans l'immédiat concernée par cette procédure de redressement judiciaire devant le tribunal d'Augsbourg (sud), les filiales opérationnelles devant poursuivre leurs activités.
Walter Bau avait présenté au cours du week-end un plan de la dernière chance pour convaincre ses 27 créanciers, parmi lesquels la Coface française, de le renflouer. Mais plusieurs banques, dont ABN Amro, renâclaient selon la presse allemandes, exigeant des conditions supplémentaires à un soutien.
L'agonie a été accélérée par l'échec en décembre d'un projet de rapprochement avec le numéro cinq allemand du BTP, Zueblin. L'hypothèse d'une fusion avec le numéro quatre, Strabag, a été également évoquée ces derniers jours mais sans résultat.
Walter Bau, une entreprise familiale créée il y a 150 ans, contrôlée aujourd'hui à 56,9% par une figure du secteur, Ignaz Walter, a longtemps été une histoire à succès, symbolisant de l'explosion de la construction en Allemagne dans les décennies 1960 et 1970.
Ses déboires surviennent près de trois ans après la chute retentissante du groupe Holzmann, lâché lui aussi par ses banques malgré l'intervention très active du chancelier Gerhard Schroeder, et aujourd'hui liquidé.
Cette fois, le gouvernement, soucieux de ne pas se brûler les doigts une deuxième fois, est resté largement à l'écart, le ministre de l'Economie Wolfgang Clement se bornant mardi à "regretter" le dépôt de bilan, tout en se disant optimiste quant au maintien "du plus grand nombre possible d'emplois".
Water Bau et Holzmann sont victimes de la purge que connaît le BTP allemand, en récession ininterrompue depuis onze ans après l'éclatement d'une bulle immobilière née après la réunification allemande en 1990.
Le secteur emploie aujourd'hui près de 800.000 personnes, deux fois moins qu'en 1995 selon la fédération du bâtiment (HDB). Walter Bau près encore 22.000 salariés il y a dix ans.
L'immobilier de bureaux stagne sur fond de croissance économique faible, toute comme la construction de sites industriels, seule la construction d'habitations particulières affichant une progression timide.
Surtout, les caisses de l'Etat et des collectivités locales sont vides, entraînant un recul des commandes publiques et aussi parfois de long retards pour les paiements, qui acculent les prestataires.
C'est le cas en particulier de la compagnie publique allemande des chemins de fer Deutsche Bahn, gros client de Walter Bau, et qui selon la fédération du secteur est l'un des plus mauvais payeurs.
Dans ce contexte morose, les 77.000 entreprises du BTP allemandes se livrent une guerre des prix féroces qui contribue à dégrader davantage leurs finances.
Seule échappatoire: le développement à l'international, les services ou les niches comme par exemple le démontage des centrales nucléaire à l'heure où l'Allemagne a décidé d'abandonner l'atome.
Des segments que Walter Bau n'a jamais occupés contrairement au numéro un allemand Hochtief, qui, lui, sort de la crise.