Inaugurées ce samedi 1er septembre par Lionel Jospin, Premier ministre, les lignes B et C du tramway de Strasbourg marquent l'entrée résolue de ce mode de transport dans le périmètre de l'aire urbaine strasbourgeoise.
En 1994, les extrémités de la première ligne ne franchissaient pas les frontières de la ville : il a fallu la première extension, en 1998, pour voir le tramway s'aventurer à Illkirch-Graffenstaden, principale banlieue du sud de Strasbourg. En 2000, la desserte de Hoenheim, Bischheim et Schiltigheim, au nord de l'agglomération, ne concerne pas seulement les habitants de ces trois communes : elle vise tous les salariés du nord du Bas-Rhin qui se rendent chaque jour à leur travail par le tramway. Les objets les plus symboliques de la nouvelle ligne expriment cette évolution : dessiné par Zaha Hadid (voir aussi en p.42-43), le terminal nord de Hoenheim, où le tram s'articule avec les modes routier, ferroviaire et cyclable, a marqué l'apothéose technique et architecturale du chantier, durant l'été 2000.
Plus proche du centre de Strasbourg, le parking relais des rives de l'Aar, conçu à Schiltigheim par le Strasbourgeois Jacques Meyzaud, témoigne de la même idée : le succès de l'intermodalité à l'échelle de l'aire urbaine repose aussi sur les atouts esthétiques des équipements correspondant à cette fonction.
Trois places majeures
Dès le lancement du concours de maîtrise d'oeuvre des lignes B et C, la Compagnie des transports strasbourgeois (CTS) avait consacré la mise sur un pied d'égalité entre les enjeux fonctionnels et esthétiques : « Je n'avais participé à la ligne A qu'en qualité de conseiller du maître d'ouvrage », se souvient le paysagiste Alfred Peter, aujourd'hui coleader de la maîtrise d'oeuvre, au côté du groupement Getas. Alors que, jusqu'en 1994, les réflexions urbanistiques s'étaient concentrées sur deux sites - la gare et la place Kléber -, le remodelage de la ville n'a laissé de côté aucune partie des 12 km des deux nouvelles lignes, sans pour autant négliger trois places majeures de Strasbourg : Bordeaux, République et De Broglie.
Désormais rodée dans sa mission de maître d'ouvrage d'un des réseaux qui a donné le signal de la nouvelle vague des tramways en France, la CTS prépare d'autres étapes : « Nous avons acquis un savoir-faire suffisant pour piloter nous-même la réalisation des prochains tronçons, en resserrant à des missions précises les maîtrises d'oeuvre d'exécution confiées à des prestataires extérieurs », analyse Alain Giesi, directeur du projet tramway à la CTS. Grâce au consensus désormais suscité par le nouveau mode au sein de la classe politique, l'opérateur a également acquis la maîtrise du calendrier : en notifiant en juin 2000 les études d'extension des nouvelles lignes confiées à Getas-Peter, Strasbourg se met en position de demander des subventions d'Etat au moment où elles se révéleront les plus disponibles, c'est-à-dire au début du prochain mandat municipal. « Le lissage de la charge des entreprises facilite la pérennité des savoir-faire acquis lors des phases précédentes », ajoute Jean-François Soulet, directeur général de la CTS.
Tram-train et tram sur pneus : foisonnement périurbain
L'extension du rayonnement géographique du tramway laisse prévoir d'autres évolutions majeures, à court et moyen terme, sur des modes de transport innovants : le tram-train vers Molsheim a suscité en début d'année la création de la Société d'intermodalité du bassin de Strasbourg (SIBS), rassemblant la CTS, la Caisse des dépôts et consignations et la SNCF. L'irruption de ce projet amène la communauté urbaine de Strasbourg à repenser son schéma de développement à l'horizon 2010 : « Nous ne pourrons plus continuer à faire converger les lignes vers l'hypercentre, en voie de saturation dans le secteur de la place de l'Homme-de-Fer. Pour relier entre eux plusieurs quartiers périurbains, nous développerons le concept de rocades ferroviaires, en nous appuyant sur des voies ferrées existantes », annonce Roland Ries, président de la CTS. Une autre innovation majeure concerne la ligne Strasbourg-Wasselonne : le conseil général y étudie un projet de tramway sur pneus qui emprunterait la route nationale 4. Principal concessionnaire du département dans le transport, la CTS espère que le renouvellement des contrats, prévu pour la fin de cette année, lui permettra de contribuer à ce projet.
Fiche technique
Concédant : communauté urbaine de Strasbourg.
Maître d'ouvrage et concessionnaire : Compagnie des transports strasbourgeois.
Maître d'oeuvre général : Groupement d'études du transport moderne de l'agglomération strasbourgeoise (Getas) - Peter.
Longueur : 12,2 km.
Coût d'investissement concédé : 1 625 millions de francs (valeur 1995), soit 247,7 millions d'euros.
PHOTOS :
La place de Broglie compte parmi les plus importantes de la ville. Elle est, à ce titre, désormais desservie par le tramway.
Le parking relais des rives de l'Aar à Schiltigheim (architecte : Jacques Meyzaud) répond au souci d'encourager à la multimodalité par l'esthétique des équipements.