Hôtellerie, restauration, blanchisserie… Le Conseil du commerce de France (CdCF) et d’autres organisations professionnelles opposées à la remontée des données de consommations énergétiques de leurs bâtiments tertiaires en 2020 et 2021 l’attendaient de pied ferme.
En ligne depuis le mercredi 12 janvier sur le site du ministère de la Transition écologique, le projet d’arrêté dit « valeur absolue II », dont la mise en consultation publique prendra fin le 3 février inclus (donc avec trois mois de retard), risque de créer de la frustration chez les propriétaires et locataires de galeries marchandes, discothèques et autres bâtiments visés par le dispositif Eco énergie tertiaire (anciennement appelé décret tertiaire).
Un arrêté « valeur absolue II » sans valeur absolue pour les commerces et hôpitaux
Contrairement aux engagements du ministère, ce texte non daté de 55 pages et téléchargeable en format Word ne contient pas la valeur absolue exprimée en kWh/m².an à viser d’ici à 2030 par de nombreuses activités qui auraient dû être concernées : les commerces, les hôtels, les restaurants, les hôpitaux, les gares, les aéroports… situés en métropole.
« C’est ce que nous redoutions, puisque nous n’avons plus de réunion avec le ministère depuis deux ans, commente Franck Charton, délégué général de l’association des commerçants et centres commerciaux Perifem. Il va falloir attendre l’arrêté valeur absolue III. »
La publication de l’arrêté « valeur absolue III » est annoncée au « début du second semestre 2022 » par le ministère. Ce texte devra détailler la marche à suivre pour les Outre-mer, bénéficiant d’un traitement spécifique, ainsi que les activités tertiaires de métropole ne connaissant toujours pas leur valeur absolue.
L’arrêté « valeur absolue II » contient tout de même douze nouvelles valeurs absolues pour douze « sous-catégories » bien précises. Elles concernent les crèches (25 kWh/m².an), les centres d’appels (100 kWh/m².an), les auditoriums et amphithéâtres (5 kWh/m².an) ou encore les open spaces des administrations de l’enseignement supérieur (40 kWh/m².an).
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De nouvelles modifications
L’arrêté « valeur absolue II » est aussi l’occasion de modifier à nouveau des points essentiels ou secondaires du dispositif.
Premier exemple : l’article 2 du texte mis en consultation modifie la définition – centrale – de l’entité fonctionnelle. Celle-ci « peut être constituée soit par un local d’activité, soit par un ensemble de locaux d’activités connexes, contenu dans un bâtiment, une partie de bâtiment ou un ensemble de bâtiments. L’établissement produit des biens ou des services : ce peut-être un site industriel, un commerce, un hôtel, un restaurant, un établissement d’enseignement, un établissement hospitalier, un établissement culturel, un équipement sportif, etc. »
Autre changement sur l’entité fonctionnelle : « Lorsque l’entité fonctionnelle est située dans un bâtiment en multi-occupations, il convient d’intégrer à la surface assujettie la part de surface des espaces communs qui lui est attribuée selon la clé de répartition des charges des consommations de ces espaces, à l’exception des centres commerciaux et galeries commerciales pour lesquels ces espaces constituent une entité fonctionnelle à part entière. »
Deuxième exemple : l’article 3 change les règles pour les bâtiments neufs dont « la consommation énergétique de référence établie sur la base de la première année pleine d’exploitation pourra être corrigée à l’issue de la phase de mise en service et de réglage des systèmes techniques du bâtiment ».
Cette correction vise notamment à « déduire les surconsommations énergétiques liées à la surcharge hygrométrique du bâtiment neuf ». Elle « ne pourra pas être effectuée au-delà de deux ans après la date de réception du bâtiment ».
Parmi les autres « modifications » et « précisions », citons l’ajustement « des données de consommations en fonction des variations climatiques » ou encore le « niveau des compétences requises pour la réalisation du dossier technique ».
Les bureaux et les écoles étaient déjà servis
Pour rappel, l’arrêté « valeur absolue II » complète trois autres textes disponibles sur Légifrance.
L’arrêté « méthode » portant sur la méthodologie du 10 avril 2020 a mis en place le dispositif Eco énergie tertiaire.
L’arrêté « valeur absolue I » du 24 novembre 2021 a notamment précisé les objectifs exprimés en valeur absolue pour les bureaux, les écoles, collèges et lycées et la logistique de froid, représentant plus de la moitié des surfaces tertiaires.
L’arrêté du 29 septembre 2021, modifiant l’arrêté du 10 avril 2020, a décalé d’un an, au 30 septembre 2022, l’obligation de déclarer les données de consommations énergétiques des bâtiments tertiaires.
Des « documents d’accompagnement » sur Operat
En attendant la deuxième version de l’arrêté « valeur absolue II », les gestionnaires immobiliers et autres professionnels concernés peuvent se familiariser avec l’Observatoire de la performance énergétique, de la rénovation et des actions du tertiaire (Operat).
Pilotée par l’Ademe, la plateforme de recueil et de suivi des consommations d'énergie du secteur tertiaire centralise les textes clés et des « documents d’accompagnement ». En outre, un « planning de déploiement prévisionnel de l’application » rappelle les prochaines étapes : « saisie des données de référence » et « calcul des objectifs » au 1er avril prochain, puis « génération de l’attestation annuelle » et « contrôles (pour les agents de l’Etat) » au 1er juillet prochain.
La date limite pour déclarer les consommations 2020 et 2021 et une année de référence à choisir entre 2010 et 2019 est prévue le 30 septembre prochain. L’objectif est de réduire les consommations d’au moins 40% d’ici à 2030, 50% d’ici à 2040 et 60% d’ici à 2050.