Chaque année depuis 2016, l’Observatoire national des contrats de performance énergétique cartographie l’ensemble des CPE conclus. Lors d’un webinaire organisé le 28 novembre, l’organisation - regroupant l’Ademe, le Cerema, le CSTB et Actee – a dévoilé les dernières évolutions constatées.
Carbone et qualité de l'air intérieur
De plus en plus de CPE intègrent une dimension carbone et fixent à leur titulaire un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). D’autres, moins nombreux, comportent des spécifications relatives à la qualité de l’air (QAI). Des indicateurs qui complètent le champ classique des CPE, initialement cantonnés aux consommations d’énergie. « La QAI peut servir à moduler la performance énergétique, confirme Pierre Boisson, chef de projet à la direction énergie et environnement du CSTB. Et pour réduire les émissions de GES, un des leviers est d’agir sur les consommations ».
La prise en compte de ces indicateurs permet d’améliorer la performance globale du bâtiment, en mettant davantage l’accent sur la qualité. « Pour réduire l’intensité carbone, on peut jouer sur le type d’énergie consommée, en fixant par exemple un objectif de taux d’énergie renouvelable, poursuit Pierre Boisson. Quant à la QAI, l’engagement contractuel portera sur un niveau de service à atteindre, avec des paramètres liés au confort comme la température ou l’hygrométrie ».
La mesure et la vérification restent difficiles
GES et QAI se heurtent toutefois à un obstacle : il n’existe pas de protocole de vérification, à l’instar de celui de l’IPMVP sur l’énergie. Les objectifs des CPE en la matière sont donc moins contraignants : il s’agit le plus souvent d’un engagement et non d’une garantie de performance. « La garantie est une obligation de résultat, sanctionnée en cas de manquement par une compensation intégrale du préjudice, rappelle Pierre Boisson. L’engagement se rapproche davantage d’une obligation de moyen, dont le non-respect peut donner lieu à l’application de pénalités forfaitaires ».
Le neuf gagne du terrain
Deuxième tendance relevée par l’Observatoire national des CPE : les maîtres d’ouvrage publics intègrent de plus en plus d’objectifs de performance dans leurs marchés globaux portant sur des constructions neuves ou sur des réhabilitations complètes. « Il ne s’agit pas vraiment de CPE au sens strict car les engagements ne peuvent pas être fixés par rapport à une situation de référence préexistante, souligne Julie Pouëssel, cheffe de projet gestion de projet immobilier au Cerema. Il convient toutefois de s’y intéresser car ils portent eux aussi sur la performance ».
La nécessité d’avoir une situation de référence s’explique par la notion d’amélioration qui est au cœur de la définition du CPE. La directive européenne sur l’efficacité énergétique, refondue en 2023 (directive UE 2023-1791 du 13 septembre 2023), indique en effet qu’il s’agit d’un accord contractuel entre le maître d’ouvrage et le fournisseur d’une prestation « visant l’amélioration de l’efficacité énergétique d’un bâtiment, vérifiée et surveillée pendant toute la durée du contrat ».
Le marché global de performance énergétique, utilisé par les maîtres d’ouvrage publics, est lui défini comme un contrat associant « l’exploitation ou la maintenance à la réalisation ou à la conception-réalisation de prestations afin de remplir des objectifs chiffrés de performance » (art. L. 2171-3 du Code de la commande publique). Ils visent donc l’atteinte de ces objectifs, et non une amélioration par rapport à une situation de référence.
Vigilance sur la simulation
« En l’absence de situation de référence, les objectifs sont fixés en valeur absolue, et non en terme de réduction, poursuit Julie Pouëssel. Les valeurs cibles sont obtenues par simulation ». Toutefois il n’existe pas aujourd’hui de méthodologie commune en matière de simulation. « Les pratiques sont très hétérogènes, relève-t-elle, alertant sur la moindre fiabilité de certaines approches. Sa recommandation : se faire accompagner par un AMO spécialisé.
Bonnes pratiques de contractualisation
Julie Pouëssel livre d’autres conseils. Le premier est de déterminer les objectifs dès le stade du programme, « pour garantir l’égalité de traitement entre les candidats ». Ils pourront ensuite être affinés lors du dialogue compétitif. Les maîtres d’ouvrage publics doivent aussi veiller au délai de contractualisation. « Ils optent souvent pour des marchés globaux pour compresser le délai de passation mais vont parfois trop vite. Une procédure trop courte ne permet pas d’optimiser le contrat car, pour ne pas prendre de risque, ce sont les hypothèses les plus défavorables qui seront finalement retenues ».
Par ailleurs, dans les contrats relatifs aux constructions neuves ou aux réhabilitations complètes, « il est possible de se limiter aux indemnités de garantie en matière de performance énergétique, sans prime d’incitation », estime Julie Pouëssel. Les acheteurs publics pourront prévoir un critère de sélection pour valoriser les offres qui améliorent l’objectif cible.