Le projet de loi Industrie verte sera débattu au Sénat la semaine du 19 juin. Le volet commande publique, relativement modeste dans la version initiale du texte (lire notre décryptage), pourrait bien s'enrichir. Quelques amendements ont déjà été déposés. L'un d'entre eux propose de rehausser à 300 000 euros le seuil en deçà duquel un acheteur peut passer un marché public sans publicité ni mise en concurrence préalables portant sur des travaux, fournitures ou services innovants. Selon son auteure, la députée Else Joseph (LR - Ardennes), "cette élévation du plafond encouragera la diffusion de l’innovation et la croissance des TPE-PME, dont le rôle dans la réindustrialisation reste incontournable".
Pour mémoire, ce seuil est aujourd'hui fixé à 100 000 euros (article R. 2122-9-1 du Code de la commande publique). Ce dispositif de dispense de procédure pour faciliter les achats publics innovants avait été instauré à titre expérimental fin 2018 avant d'être pérennisé fin 2021.
Le relèvement du plafond des marchés publics innovants sans formalités préalables profiterait particulièrement aux marchés de travaux. Ceux-ci disposent en effet déjà d'une dispense générale de procédure en-deçà de 100 000 euros, sans condition d'innovation, jusqu'au 31 décembre 2024.
Mais l'amendement laisse les acheteurs publics sceptiques sur les réseaux sociaux... A commencer par Arnaud Latrèche, vice-président de l'Association des acheteurs publics - s'exprimant sur LinkedIn - pour qui cette "proposition audacieuse" est, "selon toute vraisemblance, contraire au droit européen : le seuil de 300 000 € HT est > aux seuils européens applicable aux marchés de fournitures et services. Or, les directives ne prévoient aucune dérogation pour les achats innovants".
Le recours aux variantes facilité
Un autre amendement, déposé par Pascal Martin (UC- Seine-Maritime), entend, lui, "faciliter la présentation de variantes au sein des marchés publics, afin de permettre aux entreprises de mieux valoriser leur savoir-faire écologique". Le sénateur estime en effet que "les offres variantes qui sont des solutions alternatives à l’initiative des entreprises, constituent aujourd’hui un levier trop peu utilisé par les acheteurs pour répondre à leurs besoins."
Etrangement, l'amendement propose d'ajouter un article au Code de la commande publique, plutôt que de modifier les dispositions existantes applicables aux variantes (art. R. 2151-8 et suivants). Quoi qu'il en soit, il vise à inverser le principe applicable en procédure formalisée (appel d'offres, dialogue compétitif, etc.) : sauf mention contraire dans l'avis de marché ou dans l'invitation à confirmer l'intérêt, les variantes seraient désormais autorisées. Aujourd'hui ce n'est le cas que pour les entités adjudicatrices (marchés de réseaux...) ; pour les pouvoirs adjudicateurs, elles sont interdites sauf mention contraire.
Quant aux marchés à procédure adaptée (Mapa), l'amendement propose d'y autoriser les variantes sans restriction, en retirant la possibilité d'insérer une mention contraire dans les documents de la consultation.