Manitou convertit un chariot télescopique de Kiloutou à l'électrique

En partenariat avec le loueur, l'industriel français a développé un kit de rétrofit électrique pour l'un de ses engins de manutention les plus vendus. Après une phase d’essais démarrant en septembre, il devrait être mis sur le marché en 2025.

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Manitou Rétrofit
Le kit de rétrofit pourrait être commercialisé dès 2025.

La mise au point a duré deux ans. Manitou a présenté le 4 juin, sur la piste d’essais jouxtant son siège d'Ancenis en Loire-Atlantique, un chariot télescopique d'occasion thermique converti à l'électrique. Datant de 2017 et appartenant à Kiloutou, cet engin tout terrain, d'une hauteur de levage de 14 m, a en outre été remis à neuf afin de fonctionner pendant cinq années supplémentaires. 

Ce prototype est le fruit d’un partenariat de recherche entre le constructeur et le loueur. « L’objectif était d’obtenir un véhicule électrique doté des mêmes performances que sa version thermique (diesel) et en changeant le moins de choses possible », explique François Renault, directeur matériel et développement durable chez Kiloutou.

Casse-tête d’encombrements

Ce même niveau de performances s’entend comme assurant les mêmes capacités et puissances de charge, les mêmes capacités de manœuvre et permettant de travailler pendant une journée complète sans avoir besoin d’être rechargé. « Plus d’une journée, mais une journée complète quand la batterie est en fin de vie », précise François Renault.

La volonté de changer au minimum le véhicule, pour recycler et décarboner au maximum, a abouti à n’effectuer que six perçages supplémentaires dans le châssis. Et par exemple, à réutiliser le radiateur d’origine pour refroidir la batterie, le moteur et les chargeurs.

Pour mener à bien le projet, les ingénieurs de Manitou, de Kiloutou et de l’expert extérieur en motorisation durable Fétis ont dû résoudre un casse-tête de contraintes d’encombrements et de poids. « Au moins, contrairement à ce qui se passe dans l’automobile, le poids des batteries n’est pas un handicap. Le poids, nous en avons besoin pour stabiliser nos engins. Et la place, on en a », explique Michel Denis, directeur général de Manitou. Le poids du chariot rétrofité devait néanmoins rester proche de celui d’origine. Sinon, il aurait fallu notamment changer de châssis et ne plus utiliser les mêmes pneumatiques.

L’objectif était d’obtenir un véhicule électrique doté des mêmes performances que sa version thermique (diesel) et en changeant le moins de choses possible

—  François Renault, directeur matériel et développement durable chez Kiloutou

Consommation électrique moyenne

Le moteur diesel, lui, a forcément disparu, ainsi que le réservoir. Ils sont remplacés par un pack batterie LFP (lithium-fer-phosphate) fabriqué par Foreseepower. Cette technologie est plus sûre actuellement à défaut d’être aussi performante - dense énergétiquement - que le serait une batterie NMC (nickel-manganèse-cobalt).

Finalement, le seul changement physique visible du chariot est d’avoir perdu 2 cm de garde afin d’abaisser le centre de gravité.

L’ultime grand défi technique a consisté à ajuster le pilotage informatisé du chariot à la nouvelle source d’énergie. Pour le moment, la promesse du constructeur est que l’engin rétrofité ne consommera pas davantage d’électricité qu’un autre engin électrique sur un chantier.

Des essais pour valider le concept

Mais le développement du produit n’est pas tout à fait terminé. A l’usage, se rechargera-t-il correctement, en charge rapide comme en charge lente ? Tiendra-t-il la charge comme promis ? Tombera-t-il souvent en panne ? « Ce sera l’objet de l’expérimentation que nous entamerons en septembre avec un client qui acceptera de la mener avec nous, indique François Renault. Il n’est pas encore choisi. L’idée est de nous concentrer sur un cas et de partager nos données pour avancer, plutôt que de se disperser chez plusieurs clients. »

Du côté du constructeur, cette période d’essais terrain aboutira à commercialiser « le kit de rétrofit » en 2025, au terme d’un programme en recherche et développement « plus difficile et plus coûteux que de créer un nouveau produit ». Le premier marché de Manitou devrait être celui des loueurs, qui possèdent les plus vastes parcs susceptibles d’avoir besoin de ce rétrofit. En Europe, « nous rachèterons des chariots d'occasion et les revendrons électrifiés. Ils seront rapatriés à Ancenis et transformés dans nos usines, parce que nous sommes les seuls à maîtriser techniquement l’opération. En commençant, tout bêtement, par savoir quels composants il y a à retirer et à ne pas retirer », explique Michel Denis.

Le « kit » devrait être vendu au départ au prix d’un chariot thermique neuf, alors qu’un chariot électrique neuf est vendu 1,5 à 2 fois plus cher que son homologue diesel. « Ensuite, ce prix dépendra du marché. Et de l’acceptation par ce dernier du virage à accomplir vers l’électrique. Nous avons déjà l’expérience chez Manitou de nos gammes électriques neuves. Nos nacelles électriques sont par exemple 10 à 20 % plus chères que les versions thermiques. Malgré cette différence de prix, elles constituent la moitié de nos ventes. Dans notre vision « durable » de nos métiers du BTP, le rétrofit qui vient d’être présenté est une pierre importante à la construction de l’édifice. Une pierre de plus dont nous aurons surtout besoin quand il faudra accélérer sur ces questions », estime Michel Denis.

D’ici 2030, Manitou veut atteindre 43% de ses ventes dans le monde en véhicules à faibles émissions. Les véhicules rétrofités en feront partie.

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