Soutenu par ses deux actionnaires Accor (50 %) et Bouygues immobilier (50 %), la marque parisienne de coworking Wojo (100 salariés) maintient ses ambitions d’expansion européenne. Son dirigeant, Stéphane Bensimon, détaille sa stratégie.
Vous comptez plus de 400 espaces de travail en Europe. En 2019, vous en visiez 1 200 d’ici à 2022. Qu’est-ce qui bloque ?
L’objectif n’est pas inatteignable car nous nous lançons sur deux gros marchés, l’Allemagne et l’Autriche. Nous venons d’y ouvrir une dizaine d’adresses, avec salles de réunion, bureaux privatifs… exclusivement dans des hôtels du groupe Accor (NDLR : Ibis, Mercure, Novotel…). Avec le Brésil, nous en sommes à 500. Pour rappel, en 2019, nous avions démarré à zéro. En Europe, le coworking représente 1 à 2 % du marché de l’immobilier tertiaire. Les marchés les plus matures, à Londres et Amsterdam, atteignaient les 7-8 % avant la crise. Il y a de belles perspectives.
Heureusement qu’Accor, actionnaire à 50 % depuis trois ans, vous ouvre les portes de ses hôtels…
L’apport industriel d’Accor représente plus de 350 espaces, dont une cinquantaine de chambres transformées en bureaux à l’année. Ce nouvel axe, pour l’hôtellerie touchée par la crise, est un moyen de diversifier les activités de l’hôtel, dans les métropoles et les villes moyennes. Des sociétés s’y installent, prennent des engagements sur le long terme, jusqu’à un an parfois.
En plus des espaces dans les hôtels de votre actionnaire, combien de sites en propre comptez-vous ? Où sont-ils situés ?
Treize de nos quatorze Wojo sont situés en France, notre marché historique. Soit 66 000 m² de surface plancher dans un parc en propre de 74 000m². C’est dans ces sites que nous dégageons le plus de revenus car les entreprises s’installent de façon pérenne. Sur les 600 entreprises clientes, nous allons de l’indépendant en espace partagé au grand groupe qui préfère les bureaux privatifs.
Le bail 3-6-9 est dans le dur depuis le début de la pandémie. Quelle est votre position ?
Au premier trimestre 2022, nous ouvrirons notre quinzième Wojo, rue de Calais à Paris (IXe). Pour la première fois, ce ne sera pas une prise à bail 3-6-9, mais un contrat de management. Ce contrat de service ne fait pas de nous un locataire mais un apporteur d’affaires, sous notre marque. Les profits seront partagés avec le propriétaire. Ce contrat plus flexible nous permettra de chercher plus de rentabilité. Le propriétaire est davantage impliqué car en choisissant le coworking avec nous, c’est lui qui assume la prise de risque. Nous allons privilégier le contrat de management au bail classique.
Avec qui travaillez-vous pour vous développer ?
Nous cherchons deux profils. Les investisseurs-propriétaires, via un contrat de management pour une activité de coworking dans leurs locaux. Et les grands occupants, de 10 000 à 15 000 m² à bail. Avec l’incertitude sur le retour au bureau et la volonté de réduction des surfaces, ces derniers se retrouvent pieds et poings liés pendant plusieurs années, jusqu’à la fin du bail. Le contrat de management permet de rentabiliser ce qui est un coût actuellement. Quand l’activité redécollera ou dans la foulée d’un rachat de société à intégrer, il n’y aura pas besoin de chercher de nouveaux bureaux. Il sera possible de privatiser des postes chez Wojo, déjà sur place. Le coworking coûte moins cher que la prise à bail, car nous mutualisons les services - accueil, ménage, maintenance… - et l’occupation des espaces.
Votre développement passe-t-il par des accords signés en amont avec des promoteurs qui consacrent des espaces pensés pour le coworking, en pied d’immeubles résidentiels par exemple ?
Oui, nous regardons cela avec notre autre actionnaire, Bouygues immobilier. Dans le cadre d’un développement d’immeuble tertiaire ou résidentiel. En pied d’immeubles, les commerces, de moins en moins nombreux sur fond de développement du e-commerce, pourraient laisser place à des espaces de coworking. Wojo viendrait s’ajouter au produit fini. Les premières livraisons devraient avoir lieu en 2023-2024. D’autres partenariats sont possibles, par exemple avec un occupant de locaux commerciaux qui souhaitent optimiser ses espaces.
Les accords d’entreprise, en général sur deux ou trois jours de télétravail par semaine, se mettent en place. La concurrence s’aiguise sur le marché des espaces de travail partagés. Vous misez sur les métropoles ou les villes moyennes ?
Les deux. Nos sites en propre sont dans des grandes villes : Paris, Lyon, Barcelone… Dans les villes moyennes, nous sommes déjà présents grâce aux partenariats avec Accor. Cela nous permet de répondre aux besoins des entreprises qui gèrent un parc immobilier tertiaire colossal dans toutes les régions de France. En tant que point de contact unique, nous leur trouvons quatre postes à Blois, deux à Pau… C’est du sur-mesure, avec une même expérience de travail pour les collaborateurs.
Annoncé fin 2021, où en est le Wojo Montparnasse à Paris (XIVe) ?
Il s'agit de notre plus grand site, de sept étages, sur 13 100 m². L’immeuble neuf sera livré au premier trimestre 2022, pour une ouverture en milieu d’année.