Jusqu’au 22 décembre, Euro Disney et Epafrance organisent une concertation préalable sur le projet d’extension du parc Walt Disney Studios. Quel peut être l’impact de ce projet sur le développement du Val d’Europe, le secteur IV de Marne-la-Vallée, aménagé par Epafrance ?
L’annonce par Disney d’une extension du parc Walt Disney Studios — un investissement de 2 milliards d’euros — nous donne l’occasion de relancer la dynamique de projets sur le Val d’Europe. Le 2 juillet, le préfet de région, Michel Cadot, par ailleurs délégué interministériel au projet Euro Disney, a organisé, pour la première fois depuis longtemps, un comité de suivi de la convention Disney de 1987. Nous avons discuté des projets dans leur ensemble, du développement des infrastructures, des équipements, etc. Nous avons ainsi engagé un travail de remise à plat et entrepris un bilan de ce qui a été programmé et déjà réalisé dans le cadre de la phase IV du développement du périmètre Disney (2 230 ha), initiée en 2010 et contractualisée en 2014.
Il y a tout juste un an, la Compagnie de Phalsbourg était déclarée lauréate d’Inventons la Métropole du Grand Paris 1 pour le site Marne-Europe, à Villiers-sur-Marne. Où en est ce projet ?
Cette opération (126 000 m2) est très emblématique car elle va impulser la mutation du secteur Bry-Villiers-Champigny que desservira la ligne 15 sud du Grand Paris Express en 2025 et, plus largement, tout l’axe du nord de l’A4 jusqu’aux portes du port de Bonneuil. La gare, interconnectée (RER E et Altival), prendra place au centre du quartier. Après avoir avancé les études, notamment pour ajuster finement les emprises en lien avec les projets de transports portés par le conseil départemental, nous allons contractualiser avec la Compagnie de Phalsbourg avant la fin de l’année. Ce projet s’inscrit dans le cadre plus large de la ZAC Marne-Europe (190 000 m2) aménagée par Epamarne.
Quelles sont les autres opérations emblématiques du territoire ?
On peut citer les écoquartiers du Sycomore à Bussy-Saint-Georges et celui de Montévrain. Le Sycomore regroupera 4 500 logements à terme. Près de 40 % du programme résidentiel a été engagé par Epamarne. L’écoquartier de Montévrain, situé dans le secteur IV de Marne-la-Vallée, a pour spécificité un cœur agro-urbain : une zone de 20 ha dédiée à de l’activité agricole locale avec du maraîchage, des ruchers, une ferme-auberge, etc.
Quels sont les autres secteurs concernés par le Grand Paris Express ?
L’arrivée des lignes 15 sud en 2025 et 16 en 2030 va donner une dynamique nouvelle au secteur de Noisy-Champs, déjà desservi par le RER A. A Champs-sur-Marne, Epamarne vient de créer la ZAC des Hauts-de-Nesles. Elle jouxte la ZAC de la Haute-Maison, qui englobe la Cité Descartes, où il reste des fonciers à développer. A Noisy-le-Grand, la ZAC Noisy-Est devrait voir le jour début 2019. Elle sera aménagée par une Société publique locale d’aménagement d’intérêt national (SPLA-IN) constituée, fin 2017, entre Epamarne et la Ville de Noisy-le-Grand à laquelle s’est substitué, au printemps, l’établissement public territorial Grand Paris Grand Est. La ville de Chelles, incluse dans le nouveau périmètre d’intervention d’Epamarne, est aussi concernée. En 2030, la ligne 16 se connectera au RER E et au Transilien, ligne P.
Suite à l’extension de son périmètre d’intervention, fin 2016, Epamarne s’est-il vu confier de nouvelles opérations ?
Il est encore trop tôt pour être en phase opérationnelle. Nous en sommes au stade des études. C’est notamment le cas à Ormesson, Chennevières et Champigny-sur-Marne dans le Val-de-Marne. Ces communes sont signataires, avec Villiers-sur-Marne et Sucy-en-Brie, du Contrat d’intérêt national (CIN) de l’ex-VDO (Voie de desserte orientale). Il s’agit des emprises foncières acquises pour réaliser l’A87, un projet d’autoroute qui n’a jamais vu le jour. L’Etat a récemment transféré ces terrains à Epamarne pour y développer des opérations d’aménagement. Nous menons aussi des réflexions avec la ville de Chelles et la communauté d’agglomération Paris-Vallée de la Marne.
Les collectivités locales ne manifestent-elles pas une certaine méfiance à l’égard d’Epamarne, opérateur de l’Etat ?
Non, car nous ne nous inscrivons plus dans la logique descendante des villes nouvelles mais dans un contexte caractérisé par une large gamme de commanditaires et des modes d’interventions qui se sont diversifiés. Dans le périmètre Disney, nous demeurons le bras armé de l’Etat, dans une logique d’opération d’intérêt national (OIN) qui fait l’objet d’une convention internationale, pour autant le partenariat avec les collectivités, qui disposent de la moitié des sièges au conseil d’administration d’Epafrance, est constant. Dans les autres secteurs en OIN, nous sommes certes opérateur de l’Etat mais nous travaillons en partenariat et en co-construction avec les collectivités locales. Dans les zones hors OIN, que l’on se trouve dans le périmètre historique de l’EPA ou dans le nouveau périmètre, nous pouvons opérer aussi bien en initiative propre comme un aménageur classique par le biais de traités de concession. Nous avons ainsi signé notre première concession avec la communauté d’agglomération Paris-Vallée de la Marne pour l’aménagement de la ZAC des Coteaux à Torcy. Enfin, l’EPA peut agir à travers les SPLA-IN, qui elles-mêmes agissent comme concessionnaires.
Quels sont les atouts d’Epamarne au regard des autres aménageurs franciliens ?
Epamarne est un opérateur doté d’une masse critique qui assure une compétence de haut niveau et une grande capacité opérationnelle, sans oublier son ancrage local. Il apporte aussi une réelle capacité d’innovation.
Justement, Epamane figure parmi les pionniers dans le domaine de la construction bois. Où en êtes-vous aujourd’hui ?
Le bois, orientation prise depuis plusieurs années, répond à l’objectif de contribuer à structurer des filières industrielles dans ce secteur. Même s’il reste un peu plus cher qu’une construction traditionnelle en béton, le bois présente des avantages écologiques alliés à une rapidité de montage sur les chantiers. Aujourd’hui, 50% des logements produits à Marne-la-Vallée sont à ossature bois ou en structure mixte bois-béton. Nous commençons à bénéficier des premiers retours d’expérience, ce qui va nous permettre d’enrichir nos cahiers des charges et d’améliorer notre dialogue avec les promoteurs. L’inconvénient tient au fait que le bois de construction provient principalement d’Autriche. La priorité est donc de mettre le cap sur le bois français. Le fait d’avoir des volumes de commandes réguliers peut inciter les filières françaises de production de bois à se développer.
A Champs-sur-Marne, Vinci Construction France a un projet de tour (R+11) à ossature bois avec un parking sur deux niveaux. Quand les travaux vont-ils commencer ?
Les permis de construire sont obtenus. Nous devons conclure la vente définitive des droits à construire très prochainement.
Epamarne est également précurseur dans le domaine du BIM…
Là aussi, nous arrivons au moment des premiers retours d’expérience, ce qui va nous permettre, comme pour la construction bois, d’enrichir notre « clausier ». Nous constatons que les différents acteurs sont encore en train de se structurer sur le BIM. D’où la grande importance des BIM managers dans les opérations pour pouvoir aligner tous les intervenants autour de la maquette numérique. Le gros enjeu aujourd’hui est d’exploiter pleinement le potentiel du BIM dans la phase de gestion des bâtiments. Notre objectif est de développer des opérations en BIM qui permettent ensuite des coûts de gestion optimisés des immeubles. Nous allons essayer de travailler sur ce sujet, en associant quelques bailleurs sociaux. Cette question les intéresse beaucoup. Le même principe d’optimisation de la gestion vaut à l’échelle de la gestion du quartier, sujet sur lequel nous travaillons également. A côté du BIM, nous développons aussi des usages numériques tridimensionnels et grand public autour de la concertation. Nous avons organisé une première concertation dématérialisée pour le projet de parc urbain de Serris et à l’échelle d’un quartier, à Ormesson. Ce sont des outils très complémentaires des réunions et ateliers « physiques ».
Constatez-vous un ralentissement de la production de logements ?
En effet, la conjoncture devient un peu plus difficile au niveau national mais sur le territoire de Marne-la-Vallée, nous n’avons pas constaté de ralentissement des autorisations de logements. Il y a quelques années, la production a atteint un point bas avec 1 000 à 1 200 logements par an. Depuis, le rythme s’est durablement redressé à plus de 2 000 habitations par an (dans le périmètre historique). En 2018, nous devrions même atteindre 2 650 logements vendus, dont les chantiers sont en cours et/ou vont incessamment démarrer. En revanche, nous parviennent des signaux d’une certaine surchauffe sur les prix et les coûts de construction. Ce qui n’a rien de surprenant au regard du rythme de production francilien qui s’est quand même spectaculairement accru ces dernières années.
Dans le domaine de l’immobilier d’entreprises, quelles sont les principales opérations, en cours ou en projet ?
Concernant le tertiaire, les programmes se polarisent à l’est du territoire, dans le secteur IV, en lien avec la desserte RER et la gare TGV de Chessy qui nous met très proche de l’aéroport de Roissy. A l’ouest, les programmes de bureaux qui se réalisent à Champs-sur-Marne, dans la Cité Descartes, se commercialisent bien. Nous avons inauguré le nouveau siège de la Casden, au pied de la gare de Noisy-Champs, sachant que la banque était jusqu’alors implantée à Noisiel sur une autre station du RER A et qu’elle a souhaité demeurer sur le territoire. L’opération Marne-Europe comprendra aussi une grosse part de tertiaire. Il y a un vrai effet « transports en commun ». Du côté des locaux d’activités, le principal projet concerne la création de la ZAC de Rucherie, d’une superficie de 70 ha, à Bussy-Saint-Georges, au sud de l’A4. Elle est liée à la réalisation d’un nouvel échangeur sur l’A4, d’un coût d’environ 25 millions d’euros, financé à près de 50 % par Epamarne.
Peut-on encore parler de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée ?
Le statut de ville nouvelle ne signifie plus grand-chose puisque les SAN (Syndicat d’agglomération nouvelle) ont disparu. Les dispositifs spécifiques aux villes nouvelles n’existent plus en tant que tels. Seul subsiste l’outil OIN qui a d’ailleurs un peu évolué dans la loi Elan. Par ailleurs, une partie du secteur d’intervention actuel d’Epamarne ne faisait pas partie de la ville nouvelle. Même si on ne parle plus de ville nouvelle en tant que telle, le territoire conserve une appellation « ville nouvelle de Marne-la-Vallée » comme l’indiquent d’ailleurs les panneaux routiers sur l’A4. C’est un peu comme les villes franches ou les villes neuves qui plusieurs siècles après leur création s’appellent toujours « Ville-neuve ». C’est une trace du passé. Cela fait partie de l’identité, de l’histoire du territoire.