Vous avez été élu président du Syndicat des entrepreneurs des travaux de voies ferrées de France (SETVF) le 13 mars 2024. Quelles vont être vos priorités durant votre mandature ?
J’étais précédemment président de la commission prévention et sécurité, et cette thématique sera ma 1ère priorité. Nous avons ainsi lancé en janvier 2024 l’Observatoire de la sécurité, une plateforme sur laquelle l’ensemble des adhérents recensent tous les événements accidentels. Nous pourrons en récolter les fruits l’année prochaine, et toujours dans l’objectif de viser le zéro accident.
Puis, nous voulons œuvrer à structurer la filière ferroviaire. Pour cela, nous souhaitons travailler avec nos clients – la SNCF, la RATP, etc. - et nous rapprocher d’autres syndicats comme le Syndicat des entreprises de génie électrique et climatique (Serce) la Fédération des industries ferroviaires ou le Syntec.
Comment s’opérerait le rapprochement de ces acteurs ?
L’objectif est de créer d’ici la fin de l’année une nouvelle entité regroupant l’ensemble de ces acteurs, et ce, pour trois raisons. Cette association nous donnerait d’abord plus de poids politique, en centralisant l’ensemble de nos revendications auprès des pouvoirs publics.
Ensuite, les entreprises font face à une augmentation importante du volume de travaux, avec notamment 1,5 Mds€ de budget supplémentaire entre 2024 et 2027 dédié à l’entretien et la maintenance des infrastructures.Si l’ensemble des acteurs interdépendants du ferroviaires souhaitent pouvoir y répondre, nous devons nous organiser.
Enfin, cette organisation aurait un intérêt pour l’innovation : nous pourrions concevoir le matériel ensemble en communiquant les besoins de chacun auprès des industriels, et ainsi éviter d’investir dans des technologies qui pourraient être vite dépassées.
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Est-ce que cette réorganisation de la filière sera suffisante pour faire face à l’augmentation du volume des travaux ?
J’entends régulièrement des personnes remettre en doute la capacité des entreprises et des industriels français à soutenir cette croissance des travaux dans le ferroviaire. Or, je n’ai jamais vu une entreprise être prise en défaut et ne pas pouvoir faire les travaux. Il faudra bien sûr que l’on se mette en ordre de bataille, afin de recruter, notamment des soudeurs et des conducteurs de train, et acheter les bonnes machines. Je pense que la véritable problématique est du côté de la SNCF. Malgré l’augmentation des budgets, des chantiers sont régulièrement annulés ou réduits, par manque de moyen ou de personnel spécialisé voire par arbitrage budgétaire.
Le rail bénéficie à présent d’un soutien financier plus important que la route. Comment envisagez-vous à l’avenir la coordination de ces deux modes de transport ?
Même s’il y a plus d’argent et que le transport des voyageurs par le train se développe, le fret, ou transport de marchandises, reste peu développé, car plus couteux au global que la route. Nous aimerions sur ce point que le rail prenne une place centrale, mais il faut pour cela une volonté politique forte.
Les citoyens suisses ont par exemple accepté d’augmenter leurs impôts afin d’interdire la traversée des camions sur le territoire et investir dans le ferroviaire. Il n’y a finalement pas l’idée d’une compétition entre la route et le rail, mais de remettre ce dernier au cœur du transport de masse. Nous pourrions par exemple développer des plateformes de fret multimodales, dans lesquels des trains pourraient décharger des dizaines de camions qui livreraient ensuite les marchandises localement. Le problème de ce projet est le même que pour la plupart des projets ferroviaires : il demande des financements et une vraie volonté politique sur de nombreuses années. Or, le temps du ferroviaire est un temps long, qui nécessite de la continuité, et qui est par conséquent différent du temps politique. Face à ça, le lobby de la route reste encore très puissant, mais je suis confiant qu’à l’avenir nous puissions raisonner de concert rail et route….